Essai de confribution aux études de technologie de l'outillage néolithique
PAR
B. EDEINE
Je me suis é!evé à plusieurs reprises au cours de séances de notre Société contre l'emploi abusif ou même erroné de termes descriptifs mal choisis ou de termes ayant une signification technique précise, utilisés pour qualifier ou déiinir certains outils néolithiques, appuyé d'ailleurs de l'autorité de notre Secrétaire Général M. Gaudron.
Il est inadmissible de continuer d'appeler des outils, « quartiers d'orange, limaces, rabots, fers à repasser » ou pis encore « tarauds » alors que le taraud est un outil qui sert à fileter. Il faut essayer chaque fois que ce sera possible fie supprimer ces termes équivoques pour les remplacer par des termes précis en rapport avec la fonction de l'outil. Il est évident qu'il faut pour cela mettre en chantier une étude technologique du matériel néolithique affublé de tels noms. Je m'étonne d'ailleurs que des collègues plus compétents que moi n'aient pas encore mis à profit les travaux de technologie de notre collègue le Prof. Leroi-Gourhan pour essayer de donner une définition technologique aussi précise que possible de l'outillage néolithique. On semble oublier que dans cet outillage se trouvent en fait, ou en puissance, la plupart des outils ou des formes d'outils utilisés jusqu'à nos jours, dans ce que les ethnologues appellent la « Civilisation pré-machiniste ». C'est pourquoi je voudrais tenter pour commencer, de définir technologiquement les pièces néolithiques dites « limaces » et proposer de leur donner un nom conforme à leur utilisation.
Ces pièces, sortes de lames épaisses, à trois faces, de longueur et de grosseur variables ont comme caractéristiques de présenter deux faces retouchées et une face en général plane, et surtout que leur section forme sur la plus grande partie de leur longueur un triangle, qui dans les pièces les mieux réussies, est un triangle equilateral (Cf. Fig. 1, pièce n" 4). J'ai pris dans les séries que je possède, quatre pièces d'aspect différent, usées à des degrés divers, et une cinquième particulièrement intéressante que nra aimablement prêté notre confrère Hardouin, de Clécy-sur-Orne (Fig. 1, pièce n" 4). Si l'on examine les trois arêtes de ces pièces, on note que les retouches d'utilisation sont marquées sur la presque totalité de la longueur de la pièce.
Si l'on regarde à la loupe ces retouches d'utilisation, on constate qu'elles sont situées de part et d'autre de l'arête, indiquant que des pressions se sont exercées dans deux sens opposés. Ces retouches sont absolument semblables aux retouches d'utilisation d'un perçoir usé sur lequel on a exercé des pressions assez fortes. (Cf. Fig. 2), elles sont totalement différentes des retouches que présente un grattoir usé, où on ne trouve des égrénures que d'un côté (Fig. 3), ce qui s'explique parce que cet outil ne travaille que d'avant en arrière, en l'amenant à soi. en percussion posée, oblique, linéaire. Les trois arêtes avaient donc un but fonctionnel et on peut conclure des observations précédentes, que l'instrument était utilisé en lui donnant un mouvement alternatif de rotation sur son plus grand axe : il travaillait donc en percussion circulaire alternative. De plus ces outils sont souvent terminés par une pointe large et épaisse, tandis que le bout opposé est caréné ou arrondi. Les extrémités montrent elles aussi des retouches d'utilisation. Ces outils ne pouvaient servir à percer, leurs pointes étant trop larges. Ils ne pnu-
(*) Séance de novembre 1959.
